Vous êtes consultant. Votre objectif est d’amener votre client à mettre en pratique une nouvelle idée qui doit, en partie, changer sa façon de travailler. Plusieurs cas peuvent se présenter : soit cette idée est une promesse réaliste de résoudre un problème ou bien d’améliorer les résultats habituellement atteints, soit elle garde le client d’une situation où l’inertie sera à terme dommageable. En soi, cette position est ambitieuse, car la promesse soit être suffisamment attirante.
Qu’est-ce qui devrait rendre cette promesse attirante ?
D’abord, c’est la relation directe entre la réalisation de la promesse et la réalisation du résultat attendu par le client. Plus le client perçoit cette relation, plus il perçoit la promesse comme une proposition de valeur.
C’est, ensuite, la démonstration de la capacité du conseil à tenir la promesse. Ce sont les références du conseil ou bien de l’entreprise qui, sur la base des savoir-faire déjà mis en œuvre, étayent cette capacité.
C’est enfin l’empathie que le conseil fait surgir et qui complète l’atmosphère de confiance qui s’est installée.
Lorsque la valeur est bien perçue, il n’y a pas de grande discussion sur le prix. Soit la promesse peut être réalisée dans les mêmes conditions par plusieurs acteurs du Marché, dans ce cas le prix retenu sera celui qui conduira au meilleur coût de réalisation, ou bien la promesse ne peut être réalisée, dans des conditions acceptables, que par un seul acteur, le prix est alors le plafond au dessus duquel le client n’agira pas. Il y a généralement une négociation pour faire valoir le contexte et des perspectives de collaboration à plus long terme pour agir sur le prix.
Cependant, par certains côtés, ce scénario reste un scénario idéal. Pourquoi ?
Parce que le lien avec la réalisation de la promesse et la réalisation du résultat attendu avec le client n’est pas direct, ou, du moins, ne fait pas appel à des choses déjà connues par le client pour l’établir. Finalement, le client se demande, si, à tout prendre, c’est à dire un lien flou, il n’y a pas d’autres promesses plus simples à réaliser, notamment vis à vis du changement à conduire. Cela ouvre la porte à des concurrents qui vont jouer sur les autres paramètres, capacité à réaliser la promesse et le prix.
Le client reste avec l’impression que dans un contexte de rationalité limitée, il a réalisé le meilleur choix. C’est ainsi qu’essuyant des problèmes liés, par exemple, à un manque de vision de objectifs qui fragilise toute la chaine de prise de décision, et conduit à des arrêts et redémarrages fréquents de projets, le client renforce la Direction de Projet.
Une étape permet parfois de vaincre cet obstacle, c’est l’étape du Diagnostic qui donne le temps au client de s’approprier de nouveaux concepts pour analyser une situation. Cette étape est cependant tellement difficile à vendre, car encore moins directement liée au résultat attendu par le client.
Quelle est la situation réelle ?
Ce sont finalement les paramètres subjectifs qui sont les plus importants : la capacité à réaliser la promesse, l’empathie du consultant et un prix correctement positionné. La capacité à réaliser la promesse et l’empathie peuvent être renforcées par le fait que le consultant connaisse déjà le client ou bien qu’il ait déjà réalisé une mission pour lui, mais cela n’est pas automatique.
Bien que le rôle des cabinets de conseil soit d’amener aux entreprises les nouveaux concepts managériaux conçus par les universités ou par des experts, dans les faits, les concepts sont simplifiés, souvent dénaturés pour répondre aux exigences de l’avant-vente. Cela a été le cas du BPR, initialement conçu par Hammer et Champy pour être une méthode de management et qui, simplifiée à outrance, s’est retrouvé une démarche d’optimisation de quelques processus entraînant des gains rapides avec les dommages humains que l’on connaît. Beaucoup de méthodes, par exemple dans le domaine de la gestion du changement, sont des ultra-simplifications de concepts tirés de phénomènes observés par des chercheurs en sciences de gestion.
Et lorsque je vous dit que le lien entre promesse et résultat attendu n’est pas établi, ne soyez pas surpris, lorsque le client s’enorgueillit de la réalisation d’une promesse, de ne pas avoir de réponse à la question : « A quoi cela vous a-t-il servi ? ». Enfin, pas de réponse lorsque le client est transparent, ou bien, « cela servira bientôt », lorsqu’il l’est moins.
Que faut-il faire ?
Le maître mot dans ce contexte est la confiance. En effet, en forçant un peu le trait, le rôle du consultant est de prendre un client, aveugle, par la main et lui faire traverser un route dangereuse. La transparence est le meilleur activateur de la confiance, il est plus facile d’expliquer les fondamentaux d’une promesse et ses limites plutôt que les concepts établissant les liens avec le résultat attendu. Lorsque certains cabinets jouent sur l’asymétrie de l’information plutôt que sur la transparence, pour vendre des promesses insuffisamment liées aux résultats attendus par les les clients, ils contribuent à diffuser une image du conseil dissociée du concept d’opérations, alors que c’est un métier difficile qui doit contribuer à résoudre des situations humaines et à accroître les compétences de managers opérationnels.
Aujourd’hui, dans une période de cycle économique où les clients recherchent des approches de type « lean », l’image du conseil est associée à des prestations lourdes avec des résultats peu praticables. Pourtant, les entreprises ont besoin des consultants pour les aider à relever le défi de leurs restructurations qui demandent, outre l’expérience qu’elles ont souvent, de nouvelles idées pour être dans le peloton des gagnants.