J’ai participé à la matinée du colloque sur la « Dynamique des usages des Systèmes d’Information ». Bravo à Bruno Ménard et à l’équipe du Cigref pour un événement réussi, qui a réuni des intervenants de très grande qualité avec une diversité de points de vue tout à fait intéressante. L’affluence était finalement le meilleur indicateur de réussite.
Concis et Brillant, Gérard Berry met en perspective l’arrivée de l’ordinateur comme une révolution du calcul qui ouvre la voie de la simulation du réel en temps réel. Cela étend nos capacités de prédictions et d’adaptation à condition que l’on change nos schémas mentaux : la tâche la plus ardue.
Pekka Himanen explique que l’innovation n’est pas seulement une question de technologie dont l’usage est déterminé par la dimension organisationnelle et qui n’est parfois (souvent) pas celui qui avait été prévu initialement. Le facteur le plus important à changer pour favoriser la créativité nécessaire à l’innovation est la culture.
Le Rapport sur « la société et l’économie à l’aune de la révolution numérique », outre d’anticiper les apports et les nouveaux usages, identifie les risques sur la vie privée, la dépendance accrue aux technologies, le cloisonnement, les fractures de la société. Ces risques pourraient entrainer, socialement, une réaction de rejet vis à vis du numérique. Le rôle des politiques publiques est d’y remédier.
Le sénateur Pierre Lafitte et Bernard Benhamou ont rappelé pour le premier, les réalisations et les atouts de la France concernant l’innovation technologique, ainsi que les impacts sociétaux, notamment vis à vis de la frontière entre travail et vie privée, pour le second. L’approche exclusivement technologique ne suffit pas pour susciter les nouveaux usages, elle est, au contraire, pauvre.
Le professeur Michel Kalika nous a présenté les résultats de ses recherches, notamment que les nouveaux média et les nouveaux usages ne se substituent pas aux anciens. En effet, les cartes mentales des individus sont rarement à jour, car elles sont notamment réinterrogées sur la notion de présence. La technologie seule ne détermine pas les usages, ils surgissent de l’interaction entre technologie, structure, organisation et acteurs.
Le professeur Moez Limayem s’est attaché à présenter les usages des mondes virtuels. En effet, Gartner prédit qu’en 2012 70% des entreprises auront un monde virtuel privé. Déjà, Harvard via Harvard Cyberone donne des cours virtuels. IBM et l’Oréal utilisent habilement second life dans le cadre de la promotion de leur activité. Le secteur de l’immobilier a réalisé des applications de visites virtuelles, tandis que Boulanger met également en situation ses appareils ménagers. Enfin, la politique a aussi investi les mondes virtuels : Obama, Sarkozy, Royal et Le Pen sont sur second life.
Pour finir la matinée, Wendy Mackay a étudié le phénomène de co-évolution appliqué à la conception des interfaces hommes machines : les applications transforment les utilisateurs et les utilisateurs transforment les applications dans une dynamique action réaction. Ce travail intéressant qui s’attache à découvrir les fondamentaux de la naissance des usages et de l’évolution des usages, nécessite une collaboration multidisciplinaire entre spécialistes des technologies et biologistes.
Au sortir de la matinée, j’ai été un peu bousculé intérieurement dans mes convictions initiales, notamment sur l’impact réel de la révolution technologique qui dépasse largement la seule vision marketing. J’ai trouvé qu’il y a avait une vision claire sur la stratégie pour accélerer l’innovation via les startups, les incubateurs, les coopérations entre universités et entreprises ; une vision claire, également, sur les usages et les risques du point de vue social et citoyen. En revanche, je resté un peu sur ma faim sur le sujet de la naissance et de la diffusion de l’innovation au sein des entreprises : quels acteurs ? quels rôles ? quelles chaines de causalité ? quels coûts ? quels gains ? Ces questions feront peut être l’objet du colloque suivant.
Très intéressant ! merci pour ce compte-rendu synthétique. Evidemment cela renforce l’intérêt d’approcher le SI en tant que système complexe, c’est à dire en interaction et équilibre par rapport à son environnement (ses usages, la technologie, etc.).
La relation entre l’évolution de la technique et de l’usage est souvent assimilé au « problème de la poule et l’oeuf », comme par exemple dans le cas du Web 2.0, ou il y concurrence du changement des usages et des outils. Cette intrication est caractéristique d’un système complexe. Cela me donne des idées, je vais creuser …