Je me demande parfois pourquoi les entreprises ne commencent à penser à l’architecture d’entreprise que lorsque la question du «système d’information » apparaît. Tout semble déjà défini ou presque décidé, à l’instant de passer le relais à des informaticiens qui prennent en charge un projet d’intégration de systèmes ERP ou CRM. La préoccupation principale des informaticiens est l’alignement : » Comment mettre en œuvre la solution choisie pour répondre au mieux aux besoins et aux exigences de l’entreprise ? « . Ils se tournent à nouveaux vers les interlocuteurs métier afin de capturer et de modéliser leurs exigences en détail, et ils planifient en conséquence les travaux d’intégration et de déploiement. Partant de là, un architecte d’entreprise peut apporter un point de vue global qui assure qu’aucun impact n’a été oublié dans le plan de projet.
Lorsque la portée du projet inclut plusieurs solutions, cela devient un véritable défi, même pour des architectes de solutions expérimentés, lorsqu’il faut conduire un tel projet. Après que l’architecte d’entreprise a été appelé, il fait une revue détaillée des exigences métier afin de produire un plan de développement réaliste qui tiennent compte l’ensemble des priorités stratégiques, car gérer la complexité de l’entreprise en fonctionnement demande de travailler au niveau des usages de la technologie.
Qui pourrait douter de la complexité de l’entreprise en fonctionnement ? L’entreprise peut être comparée à un nœud de flux. Pour chacun d’eux, l’entreprise effectue certaines activités et gère celles qui sont réalisées par les partenaires ou les sous-traitants. Par exemple, au sein du flux RH, la collecte de l’application des candidatures et leur qualification peuvent être effectuées par un sous-traitant, ou c’est l’activité de paie qui est externalisée. Si elles ne réalisent pas une activité nécessaire pour un flux, les entreprises doivent au moins les contrôler. La même chose se produit pour le flux de relation client, les clients finaux ne sont peut être pas les clients directes de l’entreprise direct, néanmoins la totalité du flux doit être contrôlé par elle.
Avec le temps, les entreprises ont élaboré des processus internes pour effectuer des parties de flux et contrôler les autres parties. C’est pourquoi fréquemment des changements extérieurs à l’entreprise ont des impacts sur les activités qui contrôlent les flux et imposent de changer l’architecture interne. La même chose arrive lorsque l’entreprise souhaite changer la façon dont elle réalise ses propres activités, par exemple la mise en œuvre du Lean Management, cela influe sur la totalité du flux et entraîne des changements pour les partenaires extérieurs.
Les innovations qui modifient la façon d’effectuer un ou plusieurs flux, sont à l’origine de nombreux changements internes et externes sur les activités et par conséquent sur les usages des technologies. Le fait de considérer de nouvelles solutions informatiques met en évidence la dette technique et tous les impacts sur le système patrimonial qui, bien qu’imparfaitement aligné, offre une bonne qualité de service pour un coût raisonnable. Dans ces conditions, le rôle des architectes d’entreprise est de conduire le processus de conception d’une feuille de route acceptable par tous. La compréhension du fonctionnement de l’entreprise, la modélisation, la simulation, la planification du changement en fonction des priorités d’affaires et des ressources, à la suite du développement, la conduite du déploiement des nouvelles activités, c’est tout cela que l’architecture d’entreprise peut apporter aux innovateurs. Il travaille au niveau des compétences stratégiques métier, informatiques et des usages des solutions IT pour bâtir les points de vue larges et cohérents qui donnent la visibilité et la capacité de décision indispensable aux entreprises désireuses d’innover.
C’est tout le débat autour des nouveaux compteurs intelligents que doit mettre en œuvre ErDF en France. Ils ne représentent pas seulement une innovation technologique, mais une perspective de transformation radicale du métier pour répondre aux enjeux stratégiques de l’entreprise. En particulier, l’option de positionner l’accès aux service dans une boîte située dans les locaux du client et financée les commercialisateurs d’énergie comparée à celle d’établir un concentrateur d’abonnements géré par le distributeur d’électricité, est typiquement une discussion d’architecture d’entreprise.
Les architectes d’entreprise apportent la conception de scénarios aboutis et la conduite de prototypages pour soutenir les discussions stratégiques d’ErDF avec ses partenaires, et lui permettent de façonner plus avant une vision qui n’a manifestement pas été suffisamment développée pour être comprise par les parties prenantes. Aujourd’hui, toutes veulent leur part du gâteau et proposent leur vision propre du marché, pendant qu’ErDF est dans l’attente d’une décision politique. Pour moi, les avantages qu’en tirent les clients finaux, n’étant pas assez clairs, ils laissent se développer une résistance qui empêche de mener des discussions positives avec les autres acteurs. C’est comme dans les tours de magie où les regards sont pris dans la mauvaise direction, ici la boîte, au lieu de considérer les services aux clients. Une approche de type « Design Thinking« , couplée à la démarche d’Architecture d’entreprise aurait évité cet écueil.
Dans de tels systèmes complexes avec les questions sociales, l’architecture d’entreprise est en mesure d’apporter des outils qui donnent un aperçu des relations entre les attentes des clients, les exigences des acteurs, les possibilités technologiques et les contraintes. Elle dessine des points de vue cohérents qui tiennent compte des enjeux de tous dans tous les domaines, métier et technologiques. Elle donne un précieux support de décision pour mener une transformation de cette ampleur.
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