Les jeux olympiques, Paris 2024, sont maintenant terminés. La réussite incontestée de l’organisation préjuge-t-elle de la capacité française de relever le redoutable défi de relever la France ?
En attendant les jeux paralympiques
Sans exception, la sphère sportivo-politico-financière française se félicite du succès, non seulement de l’organisation, mais aussi de la qualité des événements et des médailles françaises, alors qu’elle n’y est pas pour grand chose.
Le véritable mérite revient aux cadres des fédérations, aux fonctionnaires des ministères des sports et de l’intérieur, aux fonctionnaires territoriaux des communes et des régions, aux cadres des entreprises de transports tout azimut, SNCF, RATP, ADP, Compagnies aérienne. Ils ont montré une capacité de travailler ensemble et de relever des défis d’une complexité redoutable en mettant en oeuvre des solutions efficaces.
Si l’on ne prend que l’exemple de la sécurité, il s’agissait de contrôler les espaces publics, sans donner le sentiment d’une présence policière pesante qui aurait nuit à l’ambiance festive. Les solutions habiles, trouvées et mises en oeuvre par les fonctionnaires et techniciens, se sont avérées efficaces. Elles ont démontré que la France n’est pas la Chine et que l’on peut faire de la sécurité en respectant notre modèle de société basée sur la Liberté.
Les syndicats ont joué le jeu, à croire que l’argent justifie la temporisation des revendications, comme les partis politiques de gauche ou de droite qui ne se sont guère exprimés pour ne pas aller à contre courant d’une ferveur nationale que beaucoup ont partagé devant leur télévision. En effet, moins d’1% de la population mondiale et, moins de 3% de la population française, ont eu le privilège d’assister réellement à ces jeux. La ferveur a été massivement relayée par les média français de tous bords qui n’ont cessé de marteler la moisson de médailles françaises, jetant un voile sur celles des autres pays, notamment les 4 pays qui sont devant la France au tableau des médailles.
On peut légitimement se demander si ces jeux étaient une fête du sport ou une fête du sentiment national ? Il semble bien que le second l’emporte sur la première et qu’il confirme l’orientation prise par les élections précédentes. Malgré tout, ces jeux démontrent un sentiment national à géométrie variable, en témoigne la variété de couleurs des athlètes des différents sports qui rappelle que la France est une Nation mondiale qui ne peut être réduite à l’hexagone européen. Ils pourraient indirectement faire avancer certains débats, comme celui sur l’immigration, qui ont été pollués par une vision étriquée de la Nation.
Les défis de la France
Si la réussite des jeux olympiques a montré les indiscutables capacités françaises d’organisation, de coordination et d’inventivité, vont-elles être mobilisables pour relever des défis dont la France a, jusque là, repoussés l’échéance ? Le déclassement économique en Europe et en Occident n’est pas le moindre d’entre eux et la relocalisation des usines de fabrication de paracétamol n’y changera rien. En effet, les jeux olympiques ont rendu visible la différence de pouvoir d’achat entre les Français et ses voisins européens que les indicateurs économiques comme le PIB par tête affichent depuis longtemps.
La géopolitique mondiale a toujours reposé sur deux piliers, l’armement et la technologie. Dans le secteur de l’armement la France possède une belle industrie dont le seul défaut est la difficulté de passer à l’échelle. Concernant les technologies, elle ne cesse de reculer alors qu’elle abritait dans les années 80 de nombreux fleurons de classe européenne. A-t-on oublié que l’ordinateur personnel avait été inventé chez Bull avant IBM ?
Un peu d’histoire. Les années 70 ont marqué un tournant de l’économie française, pour se rendre plus indépendante des matières premières énergétiques, la France a pris le virage des services et abandonné une partie de son industrie. Le déploiement du nucléaire aurait du donner un avantage aux industries chimiques qui ne sont pourtant pas parvenues, malgré cela, à concurrencer les industries allemandes. Le nucléaire a bénéficié principalement aux ménages, aux secteurs des transports et aux équipementiers automobiles. Ceci expliquant cela, ce tournant a aussi marqué une transformation radicale du secteur bancaire français qui s’est désengagé des risques industriels longs et s’est investi des risques courts liés à l’économie de services. C’est ce qui a permis le développement des banques universelles en France, à l’inverse de Allemagne, dont les banques sont restées attachées à l’industrie.
Depuis cette époque, les grandes entreprises françaises ont confié leur direction à des financiers qui ont accéléré cette tendance. Lors de son premier septennat, François Mitterand a bien essayé d’inverser la tendance et d’obliger les banques renationalisées à soutenir les projets industriels. Cependant, hors des mains de capitaines d’industries, l’argent des financiers ne peut mener à des réalisations durables. On se souvient du douloureux scandale du Crédit Lyonnais.
Ainsi, le point essentiel et difficile est la collaboration entre des industriels visionnaires, capables, et un secteur bancaire organisé pour les soutenir. Aujourd’hui la France manque des uns et de l’autre, même si de nombreux prétendants se font entendre. Ce défi est autrement plus difficile que la réussite des jeux olympiques. A une échelle réduite, c’est ce même défi que doit relever EDF.
Devenue une entreprise détenue à 100% par l’Etat, EDF n’a néanmoins pas changé de statuts, elle demeure une société anonyme. Cela suffit-il à expliquer la perte de l’appel d’offres sur les tranches d’EPR tchèques ? Certains le disent car, depuis que cet appel d’offres a été initié, le gouvernement français a indiqué vouloir lancer un programme de 6 tranches d’EPR, plus 8 tranches optionnelles, programme destiné à être porté par la même EDF. On peut aussi d’arrêter sur l’entreprise qui a remporté l’appel d’offres, le géant sud-coréen de l’énergie KHNP. La Corée un pays où l’excellence industrielle par de nombreux aspects a dépassé celle de la France, il suffit d’évoquer le nom de SAMSUNG et un PIB à 25% le fait de l’industrie contre 17,5% pour la France.
Il est probable qu’EDF considère de préserver sa capacité d’assurer le volet financier de ce projet industriel stratégique pour le pays dans un contexte politique où le gouvernement souhaite, en même temps, qu’elle s’engage sur des prix modérés de fourniture d’electricité. Le volet financier ne sera d’aucune valeur sans le volet industriel, car de lui dépendent les risques à supporter qui constituent une partie importante des coûts de réalisation. EDF a déjà lancé une importante transformation de ses processus industriels et de son management. La réussite des jeux olympiques accroîtra-t-elle la confiance dans la capacité d’EDF à réussir sa transformation et devenir, comme elle en avait eu l’intention dans les années 2010, sous la présidence d’Henri Proglio, en dépit de sa myopie sur les moyens à mobiliser, un champion mondial du nucléaire.
Ce serait une bonne chose et une retombée utile des jeux olympiques qui profiterait a toute l’industrie française.